RAISONS OBSCURES D’AMÉLIE ANTOINE

Aujourd’hui, je vous parle d’un roman qui m’attendait dans ma pile à lire depuis des mois. Quelle bêtise !

Je vous présente Raisons obscures d’Amélie Antoine paru le 2 juillet 2020 chez les Éditions Pocket qui est une réussite ! COUP DE CŒUR !

Un mot sur l’autrice

Amélie Antoine est une écrivaine qui vit à Lille.
Après avoir publié en 2011 un récit autobiographique, « Combien de temps », elle choisit l’autoédition en 2015 pour son premier roman, « Fidèle au poste », qui connaît très vite un immense succès numérique : plus de 250 000 lecteurs plébiscitent ce roman à suspense. Il obtient en 2015 le premier Prix Amazon de l’autoédition, avant de sortir aux éditions Michel Lafon en mars 2016 puis aux États-Unis.
Son second roman, « Au nom de quoi », est d’abord publié sous le pseudonyme de Dorian Meune en mai 2016. Ce texte hommage revient sur la soirée du 13 novembre 2015 au Bataclan, par le biais de personnages fictifs.
« Raisons obscures » (2019) est son sixième roman.

D’un côté, les Mariani.
De l’autre, les Kessler.
Pour les deux familles, la même routine : l’ennui au quotidien, les voisins trop bruyants, la dépression qui rampe, l’adultère qui menace…
Rien de bien grave, en fait, mais pendant ce temps, on ne voit rien. On n’a rien vu. On n’entend rien. Rien entendu.
Il n’est pas de victime sans bourreau.
Ni de martyr sans silence.

C’est mon premier roman de cette autrice et concrètement, ça ne sera pas le dernier.

La couverture et le titre sont intrigants. Le prologue annonce la couleur et embarque le rapidement le lecteur.

Ce roman est atypique et intelligente par sa construction amenant le lecteur sur un chemin auquel il ne s’attend pas.

Raisons obscures est l’histoire de deux familles ordinaires où en apparence tout va bien. Comme dans toutes les familles, nous avons tous nos secrets de famille ou des fêlures.

D’un côté, nous avons les Mariani. Claire et Frédéric mariés et ont deux enfants Sarah et Clément. De l’autre côté, nous avons les Kessler. Laetitia et Yanis mariés et ont trois enfants Marjorie, Orlane, Ezio. Le lecteur suit la vie et le quotidien des deux familles sans lien sauf qu’ils habitent dans la même ville.

Entre l’une qui lâche tout pour retrouver son amour de jeunesse et l’autre qui en ras le bol de son voisin néanmoins chacune de ses familles mènent une vie ou on ne voit et on n’entend rien.

Être aimée a un prix : ne jamais montrer ses blessures, les panser en secret et, coûte que coûte, toujours afficher un sourire Ultra Brite.

Ce roman est construit en deux parties.

L’autrice plante le décor, la vie de couple, l’adultère, le voisin bruyant, dans la première tandis que dans la seconde, l’autrice passe la main aux adolescents et c’est là où le roman prend sa valeur. Mais entre les deux, un accident grave a lieu. On quitte cette première partie d’une manière frustrante. Ce qu’on ne voit pas dans la première partie de l’histoire, le lecteur le voit à la seconde et tout prend un sens.

La plume d’Amélie Antoine est d’une précision et captivante avec des thématiques importantes et lourdes abordées avec une extrême justesse.

Je suis comme invisible. Le sablier continue de faire couler un à un ses grains microscopiques, ne prend même pas la peine de se figer un instant sur mon geste. Plus tard, ils diront qu’ils ne comprennent pas, qu’ils n’ont rien vu, que rien n’aurait pu laisser penser que j’étais aussi malheureuse. Ils diront que j’étais trop sensible, que j’étais solitaire, que je me suis refermée sur moi-même. Ils diront qu’il me manquait une case, qu’ils m’ont toujours trouvée bizarre, de toute façon. Ils diront qu’ils sont désolés, qu’ils ne voulaient pas que ça finisse comme ça, qu’ils n’ont rien fait pour que j’en arrive à cette extrémité. Ils diront qu’ils ne sont pas responsables, que c’était mon choix, qu’il faut le respecter même s’il semble complètement fou. Ils diront que ce n’est la faute de personne, qu’il ne faut surtout pas que qui que ce soit se sente coupable.

Je ne vous en dirai pas plus sauf que j’ai lu ce roman dont la seconde partie en apnée. Ça prend aux tripes et ça nous secoue !

Il a prononcé ces quatre mots et ils étaient aussi légers qu’une plume, aussi doux que le duvet d’un oisillon. C’est comme s’il venait d’ouvrir la porte de la cellule dans laquelle je m’étais enfermée moi-même ; comme si, enfin, je pouvais me redresser et en sortir sans crainte que la lumière du jour ne m’éblouisse à force d’être restée dans le noir le plus complet.

Raisons obscures est poignant, le lecteur vit toutes les émotions en ressentant de l’impuissance à la colère. Une issue finale qu’on redoute pourtant j’en reste muette. 

La pitié, c’est la cerise sur le gâteau de la cruauté, rien de plus. La pitié, c’est juste une façon pathétique de gérer la culpabilité qu’on commence à ressentir, la culpabilité d’avoir fermé les yeux, de n’avoir rien fait dès le début.

J’ai imaginé toutes les fins possibles sauf celle qu’Amélie nous offre. En fermant celui-ci, j’ai achevé ce roman des larmes plein les yeux. Je suis ressortie de cette lecture toute retournée, bouleversée et sans voix.

Il paraît que quand on se noie, il faut se laisser couler jusqu’à atteindre le fond et pouvoir donner un bon coup de pied pour remonter à la surface. Mais il faut faire quoi, quand on a le sentiment qu’on n’aura jamais fini de descendre dans les profondeurs et qu’il y aura toujours plus, toujours pire ?

Je vous recommande cette lecture haletante qui est à la fois dure et parfaite avec des personnages qui resteront gravés longtemps dans ma mémoire !

Ce roman est puissant et magistral !

• Parution chez les éditions Pocket le 02 juillet 2020
• 322 pages
• Ma note 20/20