Le Livre de Poche, LITTÉRATURE CONTEMPORAINE, LITTÉRATURE FRANÇAISE, Roman, Témoignage

LA BEAUTÉ DU CIEL DE SARAH BIASINI

Comédienne et écrivaine, Sarah Biasini est le fruit des amours de l’actrice Romy Schneider avec le journaliste italien Daniel Biasini. Elle n’a que cinq ans lorsque sa mère disparaît accidentellement et c’est en se préparant à devenir à son tour maman que l’envie de mettre noir sur blanc son histoire naît dans son esprit. Son titre : La beauté du ciel. Un ouvrage libérateur, intime, personnel mais pas confidentiel.

Quatrième de couverture

« Un matin de mai, le téléphone sonne, je réponds, « Bonjour, gendarmerie de Mantes-la-Jolie, la tombe de votre mère a été profanée dans la nuit ». »
Une femme écrit à sa fille qui vient de naître. Elle lui parle de ses joies, ses peines, ses angoisses, et surtout d’une absence, celle de sa propre mère, Romy Schneider.

Quand cesse-t-on d’être la fille aimée, à qui sa mère manque ? Peut-être jamais ? Peut-être quand on devient soi-même mère ? La Beauté du ciel, premier ouvrage de Sarah Biasini, nous emporte sur son passage. La vie demeure, envers et contre tout.

Une couverture sublime avec une jolie petite fille à la chevelure blonde comme le soleil dans les bras de sa mère dont le visage de cette femme qui ne nous est pas inconnu puisque c’est celui de Romy Schneider. Cette maman embrasse cette fillette quant à cette couverture, je trouve qu’elle reflète l’amour maternel.

Sarah Biasini, n’a que quatre ans quand Romy Schneider, sa maman, meurt quelques mois après le décès de son frère dans des circonstances tragiques et ne conserve que de vagues souvenirs. Romy Schneider était l’une des actrices préférées des Français qui est décédée soudainement et mystérieusement à l’âge de quarante-trois ans.

Trente ans après son souvenir reste intact.

Je marche constamment sur ce fil qui nous lie, tendu mais incassable. La vie que tu m’as donnée, qui me reste. Une vie interrompue il y a trente-huit ans. Une autre qui commence aujourd’hui. Au milieu, je suis là.

À la suite de la profanation de la tombe de sa mère et apprenant qu’elle allait mettre un enfant au monde, Sarah Biasini prend la plume et nous narre un bouleversant témoignage, sous l’apparence d’une lettre en s’adressant à sa fille Anna qui vient de naître.

Pourquoi je t’écris ? Pourquoi cela devient-il un travail, un besoin, une nécessité absolue ? Je ne vais pas mourir. Pas tout de suite, pas dans un an, pas à quarante-quatre ans comme ma mère. Mais si jamais, je dois te laisser quelque chose de moi. J’ai si peu de ma mère, j’aurais voulu qu’elle aussi m’écrive, mais comment pouvait-elle imaginer ce qui allait suivre ?

L’absence et le manque sont au cœur de cette histoire, des questions qui resteront sans réponses autour de la vie. Elle nous parle de la maternité, la mort et le deuil qui ne passe pas malgré les années qui passent.

Je prends conscience de l’importance de l’impression sur papier, de la fixation du souvenir, garder une trace, voir nos têtes vieillir. Capturer la joie, la beauté, l’encadrer, l’exposer, chez nous.
Je vois l’amour de ma mère sur ces photos. Je me revois fixer ses yeux sur la pellicule, ses yeux qui fixent l’objectif, qui me fixent moi.
Je la regarde de longues secondes. Je pourrais dire que je nous invente des conversations mais ce n’est pas vrai. C’est moi qui parle. Je secoue légèrement ma tête de droite à gauche, un air de lui dire « Vraiment… ». Vraiment ce que tu es belle, vraiment ce que tu m’agaces de n’être plus là, vraiment !… Je l’engueule pour mieux la chérir. Je la délaisse pour la garder près de moi. Je la démystifie pour l’humaniser. L’humaniser pour la ressusciter.

Avec ses joies et ses inquiétudes de jeune mère, l’autrice décrit son angoisse de devenir mère, sa peur de mourir, mais aussi la peur de voir mourir sa fille à chaque instant.

Ce récit est doux et poétique, Sarah Biasini témoigne tout l’amour qu’elle a pour sa mère et qu’Anna ne connaîtra qu’à travers des photos et des films.

Le cinéma me donne le son de la voix de ma mère et son visage en mouvement, ses expressions, ses surprises. Des interviews filmées et archivées.
Mais l’actrice ne m’intéresse toujours pas. De l’autre côté de l’écran, les mots qu’elle prononce ne me sont pas adressés et sont encore moins les siens.
Elle parle à tout le monde et tout le monde croit l’entendre. L’enfant s’amuse de voir sa mère importante. Suffisamment importante pour être dans un film. Le plus souvent un film où tout le monde l’aime et l’admire. Je comprends très bien qu’elle joue un personnage, j’admire juste la beauté et je cherche ce qui me lie à cette femme qui m’a faite à moitié.

D’une plume délicate fine et emplie de sensibilité, elle se livre avec beaucoup de pudeur et d’intimité. C’est une très belle déclaration d’amour aux femmes de sa vie.

J’ai littéralement été subjuguée par cette lecture toute douce et cet amour universel.

La beauté du ciel est un joli hymne à la vie que je vous recommande les yeux fermés. Ce n’est pas un livre triste mais plutôt un hommage et une ode à toutes les mamans.

  • Parution chez Le Livre de Poche le 24 août 2022
  • 214 pages
  • Ma note 16/20

Quand la mort empêche de connaître quelqu’un, on ne cherche pas pour autant ce qu’on ignore. On le laisse en blanc.
On tourne autour du sujet, de ce que l’on en sait. Si peu soit-il.
Je ne vois pas tous les films. Je ne veux pas tout savoir.
Ce que je n’ai pas pu apprendre du mort, les vivants me le diront à leur manière.
Ce ne sera pas toujours suffisant. Alors il faudra tout miser sur la mémoire cellulaire.
J’entends dire qu’on ne doit pas, qu’il n’est pas utile, de tout savoir sur la vie de ses parents. Cela m’arrange bien, ce n’est donc pas un handicap, je peux continuer dans ma vie. Je me rassure comme je peux.
Sauf que l’on finit toujours par avoir besoin de savoir. Ou par souffrir de ne pas savoir. Le manque de connaissance deviendrait un problème. Dans mon cas, le monde extérieur m’abreuve de détails, de théories, d’hypothèses, au point de me pousser à la fuite. Des informations m’arrivent de toutes parts. Je ne veux plus rien entendre.

Laisser un commentaire