Quatrième de couverture
« Depuis des années, je tourne autour de cet événement de ma vie. Lire dans un roman le récit d’un avortement me plonge dans un saisissement sans images ni pensées, comme si les mots se changeaient instantanément en sensation violente. De la même façon entendre par hasard La javanaise, J’ai la mémoire qui flanche, n’importe quelle chanson qui m’a accompagnée durant cette période, me bouleverse. » Annie Ernaux.
Mon avis
L’occasion d’un banal examen, Annie Ernaux replonge plus de trente ans en arrière. Si le souvenir apparaît lointain, l’événement n’en est pas indélébile.
1963, elle a vingt-trois ans et elle est étudiante.
Quand elle découvre qu’elle est enceinte, ce n’est pas une bonne nouvelle et encore moins le bon moment. Elle est issue d’un milieu modeste et rêve d’écrire en revanche, elle ne veut pas se retrouver mère au foyer aux dépens de ses études et de sa vie de femme.
Première à faire des études supérieures dans une famille d’ouvriers et de petits commerçants, j’avais échappé à l’usine et comptoir. Mais ni le bac ni la licence de lettres n’avaient réussi à détourner la fatalité de la transmission d’une pauvreté dont la fille enceinte, était, au même titre que l’alcoolique, l’emblème. J’étais rattrapée par le cul et ce qui poussait en moi c’était, d’une certaine manière, l’échec social.
L’événement est un court roman d’Annie Ernaux dans lequel elle raconte son avortement clandestin en janvier 1964 puisque la loi Veil entre en vigueur en 1975.
Et, comme d’habitude, il était impossible de déterminer si l’avortement était interdit parce que c’était mal, ou si c’était mal parce que c’était interdit. On jugeait par rapport à la loi, on ne jugeait pas la loi.
L’autrice nous narre un récit intime de ses semaines de solitude où elle cherche une solution pour avorter en nous livrant également de manière sociologique cette époque où l’avortement était illégal.
Annie Ernaux nous livre un témoignage bouleversant, brutal et saisissant.
Autant, je n’avais pas aimé son roman La place néanmoins celui-ci, je l’ai adoré.
Si beaucoup de romans évoquaient un avortement, ils ne fournissaient pas de détails sur la façon dont cela s’était exactement passé. Entre le moment où la fille se découvrait enceinte et celui où elle ne l’était plus, il y avait une ellipse
Cette œuvre intimiste est inspirée de ses souvenirs et de ses notes personnelles où elle nous livre ses questionnements et ses réflexions dans un langage parfois cru. Annie énonce les différentes techniques utilisées ce qui rend ce récit marquant et brutal. Le lecteur s’interroge sur les conditions de la femme à cette époque ainsi que cette violence et douleur qu’il fallait subir pour avorter clandestinement.
Sœur Sourire fait partie de ces femmes, jamais rencontrées, mortes ou vivantes, réelles ou non, avec qui, malgré toutes les différences, je me sens quelque chose de commun. Elles forment en moi une chaîne invisible où se côtoient des artistes, des écrivaines, des héroïnes de roman et des femmes de mon enfance. J’ai l’impression que mon histoire est en elles.
Quant à la plume, elle est limpide, tranchante et saisissante. Une lecture que je ne suis pas prête d’oublier.
Ce récit intemporel est puissant, horrifiant et glacial !
- Parution aux Éditions Folio
- 130 pages
- Ma note 17/20
Bonjour Julie, as-tu vu l’adaptation à l’écran par Audrey Diwan ?
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Bonjour Isabelle, non je n’ai pas encore vu l’adaptation mais j’y songe !
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Une lecture que j’avais trouvé tout aussi percutante et nécessaire!
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Oui, absolument d’accord !
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